La traversée du Chaco de nuit, je m'en souviendrais… Ce n'était pas compliqué, c'était toujours tout droit, une parfaite ligne droite sur 600 kilomètres, la ruta 16. Nous nous arrêtâmes pour dîner dans un village plongé dans le noir, tout était détrempé, un violent orage avait dû s'abattre ici et priver d'électricité tout le bourg… A peine descendu du bus, qu'une dizaine de mômes débraillés étaient agglutinés autour de moi. A n'en pas douter, l'arrivée du car représentait l'attraction de la journée… Ce soir-là, je dînais à la lueur d'un camping gaz… il faisait très chaud, genre bien moite… cela allait être mon quotidien pendant un bout de temps avant d'atteindre les contreforts andins de Bolivie… Le second arrêt eut lieu tard dans la nuit à Roque Saenz Pena, une bourgade perdue dans la brousse me dit un voyageur. Arrêt court, le temps de prendre deux ou trois passagers, de refaire un peu d'essence et de se dégourdir les jambes… le pare-brise du car était maculé d'insectes, tout comme les phares… Nous repartîmes, la route était incroyablement défoncée, je l'avais lu, c'était vrai… le bus faisait de terribles embardées pour éviter les nids de poules et les ornières… tout çà sur des kilomètres, pendant des heures, pas question de dormir pour moi… les chauffeurs étaient en pleine forme, la sono à fond… un voyageur leur tenait compagnie, çà discutait en riant pendant que passaient en boucle les sketches d'un humoriste local… apparemment c'était drôle… Arrivé à Resistencia, "la capitale du Chaco" me dit fièrement un des conducteurs, je filais direct m'affaler à l'hôtel…